Les sorties de la semaine

mardi 20 décembre 2022

Avatar : La voie de l'eau

Synopsis :

Jake Sully désormais Na'vi à part entière comprend que le répit sur Pandora ne sera que de courte durée après le retour des exploitations humaines. Cette fois-ci, il a en plus une famille à défendre...

Commentaire :

James Cameron toujours maître de la narration

Si les scénarii chez Cameron sont toujours assez simples (ou ont la qualité de la clarté diraient d'autres), la mise en scène est en revanche à chaque fois une leçon de cinéma. Cameron maîtrise comme personne le cinéma narratif si bien qu'il est capable de proposer un spectacle de 3h12 parfaitement dosé en temps forts et en temps faibles pour maintenir l'intérêt du spectateur. Les temps faibles justement servent à travailler les personnages, toujours importants chez le réalisateur. Ici le levier émotionnel est trouvé grâce à un travail sur la famille et les relations au sein de cette famille, dans un schéma d'une simplicité incontestée (quoi qu'il s'agisse d'une famille recomposée) mais diablement efficace. Par ailleurs, il est à noter que si les scénarii de Cameron paraissent simples, ce n'est pas tant du fait de leur pauvreté mais de l'habilité de Cameron à rendre le propos clair, fluide et limpide par un développement de l'intrigue parfaitement pensée et une mise en scène qui sait mettre en valeur les éléments importants de narration. Toutefois, il est impensable ici de ne pas mentionner la qualité visuelle du film et la caméra virtuose dans cet environnement qui fait énormément pour l'immersion. Le film est graphiquement et visuellement riche à chaque plan, dont certains éléments ne sont pas relevés verbalement mais simplement montrés. C'est cela le Cinéma. A titre d'exemple, les Na'vis des îles ont des membres supérieurs plus larges ainsi qu'une queue plus massive pour servir de gouvernail. Jamais les personnages ne le disent directement mais la mise en scène insiste grâce à certains plans sur ces éléments. Le monde est donc plus large que ce qui est dit et en cela le monde est crédible et cohérent... en plus d'être un personnage à part entière. Pour les fans de la filmographie de James Cameron, certains retrouveront aisément des références au premier Avatar (par les dialogues, les phases initiatiques) mais également à d'autres films comme Abysse en encore à plusieurs scènes de Titanic. James Cameron aime la mer / l'océan comme lieu où se déploie une intrigue. Pour en terminer avec l'aspect technique, la bande musicale est ici l'œuvre de Simon Franglen, collègue du regretté James Horner qui reprend habilement et logiquement les thèmes du premier film pour garder une réelle cohérence d'ensemble. Certains thèmes sont nouveaux mais toutefois peu marquants, ne pouvant éclipser la puissance des thèmes de 2009.

Une variante thématique du premier opus

Seul petit défaut du premier Avatar : un message juste mais un peu trop manichéen, si tenté que les Na'vis renvoient aux peuples indigènes terrestres (nouveau renvoi ici aux Amérindiens avec une scène d'attaque de train). Le mythe du bon sauvage a vécu mais comprenons que James Cameron ne cherche pas tant à défendre nécessairement les indigènes qu'à critiquer le modèle capitaliste poussé à son paroxysme lorsqu'il s'allie au militaire. Cameron décrit simplement mais justement les dérives si ce n'est même la nature du capitalisme. Le premier épisode pointait du doigt l'extractivisme (avec un minerai au potentiel incroyable). Dans cet opus, ce n'est plus le minerai qui est recherché mais le vivant, qui est symboliquement le liquide cérébrale d'êtres intelligents. Les humains viennent alors marchandiser le vivant après avoir exploiter les ressources inertes de l'île. Tout peut être réduit à des chiffres. Propos qui n'a jamais été aussi juste. Néanmoins, il est possible d'avoir un regret sur ce cet épisode. Le message et les enjeux ne changent guère entre les deux épisodes, il s'agit uniquement d'une variante qui manque un peu d'originalité contrairement à l'exploration visuelle et culturelle des nouveaux biomes et cultures montrés. 


En définitive, Avatar : la voie de l'eau est une nouvelle plongée visuellement incroyable dans l'univers de Pandora, aidée en cela par une mise scène qui est un modèle de narration. Seul bémol, la thématique (et donc le scénario) n'est qu'une variante du premier épisode. 


******

dimanche 13 novembre 2022

Black Panther : Wakanda Forever



Synopsis

T'Challa n'est plus. Le Wakanda est en deuil et sans protecteur, Killmonger ayant brûlé toutes fleurs permettant de devenir un Black Panther...

Commentaire
 
Une réalisation toujours aussi soignée de Ryan Coogler

Ce nouvel épisode mettant en scène le héros du Wakanda bénéficie d'une mise en scène soignée de Ryan Coogler. Par leurs thématiques les Black Panther recèlent une certaine gravité mais celui-ci avait en plus à traiter la disparition de l'acteur principal Chadwick Boseman. Il en résulte un film trés sérieux pour un Marvel ; exit donc les blagues récurentes et la dédramatisation régulière d'un Thor : Love an Thunder. Le film prend le temps de traiter ses sujets en ménageant des temps faibles. Cette qualité peut aussi être un défaut sur certains passages car le film a une durée certaine et certains éléments de l'intrigue évidente mettent du temps à advenir. Au delà du rythme, la caméra est virtuose dans ce monde presque exclusivement composé en numérique. Les mouvements et les angles de caméra varient constamment et ce, pas uniquement pour les scènes d'action. La photographie est également réussie, toutefois dans la mise en scène, rien n'est particulièrement original pour un film avant tout narratif. Le casting, presque exclusivement féminin fait un bon travail (mention spéciale à Angela Bassett - la Reine mère - et Danaï Gurira - Okoye -) sans toutefois faire oublier l'absence de Chadwick Boseman. La bande musicale de Ludwig Göransson de retour fait beaucoup pour ancrer l'univers du Wakanda et soutient également les temps faibles de la réalisation. Toutefois, le film ne possède pas de scène d'exposition ou contemplative permettant à la composition de se mettre aussi en valeur que dans le premier épisode.

Thématique : la Justice par la paix ou la violence : une redite du premier ? 

L'antagoniste de cet opus est Namor, chef du peuple des mers issu des civilisations précolombiennes (Maya). Pour pouvoir garder la thématique de la critique du monde occidental, Marvel a donc transformé le héros de l'Atlantide (grec) en héros d'origine d'amérindienne, il reste toutefois quelques traces de l'ancienne origine dans les chants de sirènes séduisant les marins. Il s'agit comme pour le premier opus d'un film communautaire (sans connotation négative) mettant en avant d'autres cultures. Ici, le monde du peuple de la mer issu de la civilisation maya est assez travaillé et intéressant visuellement et culturellement (langue utilisée). Il en demeure toutefois un problème pour l'intrigue : le film oppose les civilisations mais ne peut réellement décrire les ennemis du Wakanda comme des méchants (car cela manquerait de délicatesse pour les peuples d'Amérique centrale). Il en résulte que la résolution de l'intrigue n'est pas pleinement satisfaisante. En revanche, le fait d'avoir un antagoniste ambigu est intéressant car ses motivations sont compréhensibles voire partageables. Un bon méchant est un gage de qualité pour un film de super-héros. 
Le film affiche une volonté cathartique, dans la veine du premier épisode. En intrigue secondaire, il en profite pour mettre une petite claque (bien méritée) aux anciennes puissances coloniales toujours à la recherche de plus de ressources à exploiter. Toutefois, la description géopolitique actuelle est un petit peu simpliste car les politiques impérialistes en Afrique aujourd'hui (au Mali par exemple) ne sont plus simplement le fait du monde occidental. Les charniers au XXIème siècle sont plutôt le fait de puissances illibérales, bien que la politique capitaliste de l'occident soit encore critiquable. Dans le même ordre d'idée, appelé les "blancs" par le sobriquet de "colonisateurs" est oublier que d'autres peuples ont déjà eu ces mêmes aspirations (avec moins de moyens certes) et que tous les peuples caucasiens n'ont pas forcément eu des empires coloniaux. Ross (Martin Freeman) en tant qu'américain peut être le représentant d'une politique impérialiste, toutefois les Américains n'ont pas eu d'empire colonial. Pendant la guerre froide avec l'URSS, les deux superpuissances étaient en faveur de la décolonisation. Néanmoins, Marvel ne peut prétendre donner un cours de géopolitique et le film joue habilement sur la crête de la démagogie avec certaines communauté, à la manière du dernier Black Adam de DC. Fait habilement, cette catharsis n'est pas forcément un mal. 
Toutefois, la faiblesse thématique de ce film n'est pas la justesse du propos mais le fait qu'il s'agisse d'une redite des enjeux du premier Black Panther. En effet, le premier Black Panther était un réinvestissement du duel théorique entre Martin Luther King et Malcom X. Le but est la Justice mais les moyens d'action diffèrent. Ici, la même opposition voit de nouveau le jour entre le Wakanda et le Prince Namor. Toutefois, la réponse a déjà été apportée dans l'opus précédent. Le film rate en plus cette fois-ci le symbole car Shuri porte les couleurs de Killmonger, même après avoir renoncé à la vengeance. Elle aurait dû reprendre les couleurs de son frère après la résolution de son dilemme, ainsi le message aurait été clair et l'héritage de T'Challa intact. 


En définitive, Black Panther Wakanda Forever est un bon épisode marvélien, sans toutefois se hisser au même niveau que le premier épisode. Si l'inclusion de la culture maya est incontestablement un succès, le dilemme thématique entre la violence et la non-violence dans un idéal de Justice est une redite du premier opus. 


******

lundi 24 octobre 2022

Black Adam


Synopsis :

L'ancien esclave devenu héros Tedh Adam, de l'antique pays du Kahndaq est invoqué après avoir dormi 5000 ans. Le monde a bien changé mais les habitants du Kahndaq n'ont toujours pas goûté à la liberté...


Commentaire :

Réalisation sans répit de Jaume-Collet Serra 

Jaume-Collet Serra est un habitué de l'action mais se voit confier pour la première fois un film de super-héros. Il réinvestit son style testostéroné dans le genre avec pour conséquence des scènes d'action plutôt bien définies et lisibles mais également un rythme trop soutenu et une faible place laissée au travail des personnages. Il en résulte une réalisation manquant de respiration, notamment dans la seconde partie, dans le traditionnel final DC gavé de CGI plus ou moins convaincants. La mise en valeur du héros et la teinte mythologique par la mise en scène (plan, angle de caméra) est en revanche agréable à voir, à contrario de la mise en scène Marvel qui tend à ringardiser constamment ses personnages et désamorcer toute dimension épique à ses films. La mise en scène peut rappeler la vision de Zach Snyder sans toutefois atteindre la même maîtrise. La musique de Lorne Bafle a la qualité d'être très présente et de définir clairement un thème aux personnages dans la tradition wagnérienne des leitmotivs. La bande musicale permet même de relancer de la tension et de l'épique là où la mise en scène peine à le faire. Toutefois, cette présence ultradominante (à l'image des scènes d'action) donne là encore l'impression que le film force pour obtenir l'attention du spectateur autrement que par le scénario.   

Un sentiment de déjà vu

Si l'action est la dominante du film avec une mise en image honorable, elle ne peut malheureusement s'appuyer sur un scénario solide et innovant. En effet, tout est prévisible et anticipable du fait d'un manque de subtilité d'écriture. Le spectacle est là ; le visuel (notamment des personnages) est abouti mais l'intrigue peine à trouver de l'intérêt. Dwayne Johnson campant le personnage principal, Black Adam n'est pas réellement un personnage ambigu et loin d'être un anti-héros voire un super-vilain (comme il l'est dans le comics). Il protège les faibles et tue des méchants (qui sont ultra-violents et dépourvus d'humanité). Il n'y a donc que peu d'incertitudes et d'intérêt autour du personnage et il est prévisible de comprendre qu'il fera les bons choix. Par ailleurs, Dwayne Johnson d'habitude plein d'humour est d'un sérieux un peu triste pour incarner son héros, à qui il veut donner une dimension mythologique. Autre élément peu original au delà du scénario : la Justice Society. Cette dernière, dans les décors et la mise en scène est un copier-coller des X-Men, sans développement, ce qui n'a donc que peu d'intérêt.

L'interventionnisme contre le sentiment de fierté nationale 

L'intérêt et l'originalité du film se tient peut-être dans sa thématique grossière mais encore assez originale et juste. Le film apporte un regard très critique sur l'interventionnisme occidental dans les pays de Moyen-Orient (le Kahndaq ; pays fictif) en défendant le point de vue de la population locale. Cette population est représentée par une mère et son fils ainsi que par Black Adam qui est le héros attendu de ce pays exploité. Il incarne ainsi le retour de la fierté nationale dans un pays humilié. L'état du pays en situation de quasi-colonie est expliquée par la présence d'une ressource rare qui a pour conséquence la présence de milices étrangères (occidentales). Cette description de la situation des pays en développement, riches en ressource, est très basique mais a le mérite de porter un regard critique et décentré sur l'interventionnisme occidental. Toutefois, le film enfonce des portes-ouvertes : un tel propos aurait été plus subversif au début des années 2000. 

En définitive, Black Adam est un film DC plutôt divertissant mais assez paresseux dans l'écriture. Pour les amateurs d'action. 



******

samedi 17 septembre 2022

Tout le monde aime Jeanne



Synopsis

Icône de la start-up nation et de l'écologie, Jeanne voit sa vie s'écrouler lorsque son projet phare pour la récupération de plastique en mer tombe à l'eau... 


Commentaire :

Une prise de vue réelle teintée d'animation

Céline Devaux choisit de mêler les styles avec un drame teinté d'humour et une prise de vue réelle teintée d'animation. La dominante du film reste le drame car le sujet principal est la dépression. La colorimétrie oscillant entre le jaune et vert retranscrit cet univers morose dans lequel même le soleil portugais ne peut rendre le cadre totalement joyeux. Ce choix vise à détacher assez habillement le personnage du contexte comme si ce dernier n'arrivait pas à se plonger dans la réalité, toujours entravé dans une monde embrumé. L'insertion de plans d'animation vient ouvrir une fenêtre sur la psychologie du personnage permettant de montrer le cynisme des situations mais également de faire ressortir quelques traits d'humour. L'alternance entre les plans longs et froids des phases de dépression et les plans plus légers d'animation permet de faire respirer une œuvre qui sinon aurait été un peu lourde. L'intervention du personnage de Laurent Lafitte permet également de relancer un rythme sinon trop lent. Toutefois ce montage et cet rythmique permettent de retranscrire finement la situation dans laquelle est plongé un individu en dépression. A la bande musicale, Flavien Berger arrive avec des instruments singuliers (et des bruits du quotidien) à retranscrire le monde lancinant et parfois malaisant de la dépression.

Traiter la dépression ; d'une fine description à une résolution avortée

Le point fort du film est la description et la retranscription du sentiment de dépression, état dont il est difficile de faire l'auto-diagnostique ou qu'il est parfois plus aisé de nier. L'état de Jeanne est intelligemment caché au spectateur, qui n'est pas plus informé que la protagoniste sur le sujet, tout au plus, il sait que quelque chose cloche. C'est donc un autre personnage Jean, ayant fait l'expérience de la dépression qui permet au personnage et au spectateur de se rendre compte de la situation. Si l'explication de l'entrée dans un état dépressif est finement montrée (causes multiples - échec personnel, deuil) la sortie de cet état est un peu expédié et à ce titre le film aurait pu montrer quelques pages supplémentaires de la vie de Jeanne. En effet, même si Jean semble un personnage en définitive plutôt positif pour Jeanne, son comportement (lourd, limite malaisant ou déplacé) ne permet pas non plus de lui faire totalement confiance. Il peut être vu comme un personnage profitant de l'état dépressif de Jeanne. Par ailleurs, l'amour ou du moins l'attache à un nouveau personnage permet-il de résoudre la question du deuil et de l'échec personnel ? Jeanne va finalement mieux, mais le film la laisse dans une situation précaire et peut-être temporaire...


En définitive, Tout le monde aime Jeanne est une comédie dramatique saisissant plutôt habilement l'état dépressif. La question de la sortie de cet état est plus délicat. Alternant prises de vue réelle et animation, cette proposition de cinéma se laisse aisément regarder, emmenée par un beau casting.



******

 

mercredi 14 septembre 2022

Hors-Série - Les anneaux de pouvoir

 


[Les Anneaux de Pouvoir : prometteur mais imparfait]

Force est de constater que la série des Anneaux de pouvoir est plutôt agréable à regarder et satisfait autant par la mise en scène léchée du talentueux J.A Bayona que ses effets spéciaux qui frôlent la perfection. La série est emportée par l’incroyable Morfydd Clark qui incarne parfaitement Galadriel de part ses traits physiques correspondant à la beauté elfique et par son jeu qui transmet clairement le côté déterminé du protagoniste. Un des points forts de la série est manifestement son rythme qui prend le temps de mettre en place le monde de 2nd Age, conforme à l’esprit de Tolkien qui aimait se perdre dans de longues descriptions mais aussi à la Trilogie de Jackson qui a pour caractéristique sa durée. En ce sens, la série évite la critique qui aurait pu lui être faite de transformer la licence en simple série d’action. La Terre du Milieu est beaucoup plus que ça.
Néanmoins, la comparaison avec la Trilogie de Jackson s’arrête là même si Howard Shore et surtout Bear McCreary à la composition font beaucoup pour rattacher à l’ambiance des films. En effet, là où les Anneaux de pouvoir est une série plutôt réussie par son intrigue et son univers, la Trilogie de Jackson a été une révolution au cinéma autant pour le genre, la narration, les effets spéciaux, que le mode de production, par la suite maintes fois singée. Chez les séries, c’est bien Game of Throne, le concurrent qui a marqué et changé le genre. Au contraire, les Anneaux de pouvoir s’inscrit dans l’existant que cela soit des productions Amazon (La Roue du temps) ou bien des productions Netflix (thématiquement). Car l’univers de Tolkien est tordu pour raconter de nouvelles histoires (l’histoire des Piévelus et une énième romance Elfe-Homme qui chez Tolkien est plutôt rare). Par ailleurs l’inclusion du cosmopolitisme de manière aléatoire est plutôt ratée alors que l’origine des peuples chez Tolkien est quelque chose de travaillé et encadré. En effet, chez Tolkien, les peuples correspondent aux anciens peuples du monde tels les Celtes, Germains etc avec des déclinaisons à l’intérieur (Angles, Frisons par exemple). Ils présentent alors une certaine homogénéité. Impensable donc qu’un groupe de cinquante âmes présentent 4-5 ethnies différentes, comme c’est le cas chez les Piévelus. Cela passe mieux dans le grand royaume des nains et aurait pu passer encore mieux chez les elfes qui ont parcourus le monde et se sont établis à maintes endroits. Or ce peuple semble plutôt homogène (si on omet Arondir). Mais pour la plupart des peuples présentés, une homogénéité interne aurait eu plus de sens quitte à mobiliser plusieurs peuples différents pour inclure plusieurs profils d’humains. Tolkien décrit les Piévelus comme ayant la peau "brune", pourquoi ne pas saisir cette opportunité ? De même pour les Hommes du Sud du Tir Harad... Nombres d'opportunités existaient pour inclure de la diversité avec un sens géographique! Si le choix passe par ailleurs plutôt bien chez les nains (mention spéciale à Sophia Nomvete, personnage le plus attachant jusqu'à le) qui sont morphologiquement marqués, il passe beaucoup moins bien chez les Hommes et les Elfes. En effet, rien ne les distingue véritablement si ce n’est leurs oreilles. Il en résulte qu’un elfe blanc ressemble plus à un Homme blanc qu’il ne ressemble à un elfe noir. Pourtant, ils sont présentés comme mutuellement intolérants les uns avec les autres ; Homme et Elfe, ce qui visuellement n’a pas de sens. Si Galadriel est effectivement belle, ce n’est pas le cas des autres elfes montrés et ils auraient gagné à avoir des traits distinctifs plus prononcés (dans la lignée de Jackson qui avait joué également sur les cheveux et dans une certaine mesure sur les traits du visage des elfes).
Concernant l’intrigue de la série, il est trop tôt pour dire si elle est sera satisfaisante. L’ajout de personnages féminins est intéressant (Nori, Bronwyn). Toutefois, toutes les nouvelles histoires devront (et même les ajouts à celle de Galadriel) tenter de rester fidèles à l’esprit des livres de Tolkien tout en apportant une intrigue riche et originale. A suivre donc…

lundi 18 juillet 2022

Thor Love and Thunder

 

Synopsis :

Après la victoire contre Thanos, Thor a retrouvé sa force d'antan mais pas le moral. Il lui manque un sens à sa vie. C'est alors qu'un certain Gorr "le boucher des dieux" apparaît, obligeant Thor a reprendre du service... 

Commentaire : 

Du Waititi, à outrance 

Taika Waititi est une nouvelle fois derrière la caméra pour filmer le dieu Viking. Il imprègne très fortement l'univers sur certains points. L'humour, déjà présent chez les Marvel, est encore plus poussé pour cet épisode, si bien que le personnage principal Thor n'a plus qu'une fonction comique. La tragédie est entretenue par les personnages secondaires Jane Foster et Gorr, tous deux campés par des Nathalie Portman et Christian Bale très bons dans le jeu. Toutefois, l'atmosphère du film garde une très forte tonalité comique dont le rythme est celui du gag. Malheureusement, le film de Waititi est ici à contre-temps. Les gags ne font pas tous mouche et ont pour effet de désamorcer la gravité de l'intrigue. Ce faux rythme comique peut procurer un sentiment de longueur alors même que le montage est lui plutôt classique (dynamique) pour un film du genre. La mise en scène ne se signale que par sa belle photographie pour un univers, il faut le reconnaître, créatif. La séquence en noir et blanc avec simplement quelques ajouts de couleurs sur certains objets est également plutôt réussie. La bande musicale est composée de plusieurs musiques des années 80 plutôt bien choisies ainsi que de la musique orchestrale de Michael Giacchino qui ne se signale par aucun nouveau thème notable, ni même aucune réutilisation des thèmes précédents. Dommage. 

Profiter de la vie et choisir l'amour

Taika Waititi a toujours à cœur d'inclure une morale dans l'histoire. C'est ici une morale assez bateau ; il s'agit de l'amour. La vie n'a de sens que lorsque l'on aime, et cette quête sera autant celle de Thor que de son antagoniste Gorr. Il s'agit aussi d'une pensée du présent car Thor choisit à la fin l'amour (Love) plutôt que le tonnerre (thunder), autrement dit la bataille à venir. L'important est donc le présent et non ce qui adviendra, voire en extrapolant, il est possible de dire que le présent est plus important que l'arrière-monde des religions. Il y a en effet une critique assez ouverte de la croyance (pour le moins païenne). En effet, les dieux n'ont que faire des croyants dans le film, ces derniers (Gorr et même Thor face à Zeus) étant représentés comme de grands naïfs. Pourquoi s'intéresseraient aux êtres inférieurs? Il faut donc se consacrer au présent et faire les choses par soi-même ; voilà la morale du film. 
D'autres questions sont abordées en filagramme comme l'homosexualité car le film représente un amour gay et un personnage lesbien. Cela n'est pas appuyé mais revient à plusieurs reprises.

 

En définitive, Thor Love and Thunder est un film de comédie avant d'être un film d'aventure, car les gags plus ou moins réussis ont pour conséquence de désamorcer le tragique et de diminuer le côte épique. Pour les amateurs de Waititi plutôt qu'aux amateurs de Marvel. 


******


dimanche 3 juillet 2022

Elvis

 

Synopsis :

Elvis, jeune garçon élevé dans la culture et la musique afro-américaine, bouleverse le monde de la musique en mêlant la country au rhythm and blues. Dans une Amérique divisée par la question raciale, le prodige du Rock'n'roll unit les Etats-Unis dans la musique...


Commentaire :

La mise en scène rock 'n' roll de Baz Luhrmann 

Baz Luhrmann cherche une mise en scène rock 'n' roll qu'il transcrit à l'écran à l'aide d'un montage très rythmé. Les effets visuels, notamment d'incrustation de texte sont pléthores. Les mouvements de camera (numériques ou réels) permettant les transitions sont également nombreux. Si on ne peut que reconnaître l'attention portée à la mise en scène, l'accumulation d'effets (mentionnons également les split-screens) nuit à la fluidité de l'histoire, du fait d'effets trop voyants et d'un rythme qui n'offre aucun temps faible (de repos). Néanmoins, la mise en scène correspond bien à la musique dépeinte et au personnage qu'elle souhaite présenté. Par ailleurs, certaines scènes semblent inventées pour correspondre à une certaine thématique, et donc réaliser de la mise en scène. Par exemple, lorsqu'Elvis est perdu dans sa vie, cela est transcrit par une scène dans un labyrinthe de miroirs. Ainsi un grand nombre de scènes parait présent dans un objectif thématique et de réalisation sans avoir de réalité historique. La musique est essentiellement composée d'un medley des meilleures musiques d'Elvis Presley selon la période narrée. Il est dommage à ce titre que les morceaux d'Elvis soient sous forme d'extraits, rarement en entier. La musique orchestrale d'Elliott Wheeler est à côté très discrète et n'a d'autre fonction que d'accompagner l'histoire.

Biopic très largement romancé 

Si ce biopic correspond dans les grandes lignes à la vie d'Elvis Presley (puisqu'un bon nombre de scènes sont thématiques et non historiques), les péripéties du chanteur semblent amplifiées pour coller à certains sujets. En effet, la cause noire, - la ségrégation et la discrimination - semble très appuyée comme si Elvis avait été un pond entre ces deux Amériques dans les années 60. Etait-il si politique, dans le sens proche de la culture afro-américaine ou le film choisit-il de faire correspondre la vie du chanteur à une thématique actuelle mais également plus prenante pour le scénario ? Plus largement, les moments de rébellion face au monde qui entoure Elvis, ou face à son manager Tom Parker, sont-ils si épiques à l'image des scènes du film ? Le film prend en tout cas un parti pris et l'interprétation magistrale d'Austin Butler et de Tom Hanks permet d'y croire. 


En définitive, Elvis est un film à la réalisation rock 'n' roll dont il faut être capable de suivre le rythme effréné. 


******

mardi 14 juin 2022

Jurassic World : Le monde d'après

 


Synopsis :

Les dinosaures ne sont plus seulement dans le parc mais partout autour du globe : bienvenue à Jurassic World! Les expériences génétiques, pleines de promesses, ont toutefois crée un monde où l'avenir n'a jamais été aussi incertain...


Commentaire :

Le retour de Colin Trevorrow et du plan-plan

Si Bayona avait su redonner du souffle à la saga Jurassic World avec une mise en scène léchée, réfléchie et visuellement impressionnante, Colin Trevorrow vient replonger la saga dans ses premiers déboires avec une mise en scène purement fonctionnelle. Certes quelques plans sont symboliques mais d'une banalité confondante en comparaison de l'épisode précédent, à l'image du T-Rex passant sa tête dans un cercle pour reproduire le logo de la saga. Quelques idées restent intéressantes comme la pluie de sauterelles (référence aux dix plaies d'Egypte), visuellement aboutie mais quelque peu éloignée de ce que devrait proposer un Jurassic Park/World. Ainsi, aucun élément de la mise en scène n'est particulièrement innovant ou pertinent. L'action est plutôt bien filmée car fluide mais là encore, elle n'a pas forcément sa place dans un film qui est censé être un film d'aventure avant d'être un film d'action. A ce titre la course-poursuite dans l'île de Malte est visuellement réussie mais longue et inappropriée car elle ne sert ni le scénario ni les thématiques du film. Pourtant le premier Jurassic World mettait en garde contre la surenchère. En revanche, d'autres éléments liées aux effets spéciaux sont plus satisfaisants comme le retour massif aux animatroniques quand cela est possible et les décors en dur, ce qui a pour effet d'amener ou ramener de la pesanteur - de la crédibilité à cet univers.  
A la musique le talentueux Michael Giacchino suit la consigne d'accompagner un film d'action avec le classique recours aux violons rapides et répétitifs. Si la mission est remplie, on est loin de la belle partition de John Williams qu'il avait pourtant su reprendre avec habilité dans le premier Jurassic World. Non seulement les thèmes ne sont pas de retour (quelques notes seulement) mais aucun nouveau thème ne vient emporter l'histoire. Assez décevant de ce point de vue. 

Un scénario toujours bancal 

Si certains éléments critiquables tiennent à la crédibilité de l'histoire d'autres sont en lien à la structure globale du récit. Un film de science-fiction doit présenter des postulats solides, étant avant tout une extrapolation scientifique. Le premier problème réside dans le fait de donner vie au titre du film : Jurassic World. Ainsi les dinosaures ne sont plus isolés dans un parc mais bien présents sur l'ensemble de la Terre. Si le film est cohérent avec son titre, il n'est pas cohérent avec son postulat premier qui montrait des dinosaures confinés sans problème sur une petite île du Costa Rica pendant deux décennies. Bien qu'en partie sortis de l'île par les soins de l'Homme, les dinosaures se retrouvent présents en quelques années tout autour de la Terre et cela pour toutes les espèces! La vie trouve toujours un chemin certes, mais l'ellipse est trop facile. Passée cette révélation annoncée par une voix-off et quelques cartes dans les premières minutes, Jurassic World démarre. Le film commence mais traîne en longueur du fait qu'il aille chercher individuellement chaque protagoniste de l'ancienne et de la nouvelle trilogie. Les histoires ne se croisant que tardivement, le film peine à captiver alors que s'enchaînent les scènes d'action. Néanmoins, la partie concernant l'ancien casting est plus prenante du fait du retour de personnages attachants, à nouveau assez travaillés, alors que la nouvelle génération se perd dans les courses-poursuites. 

Des thématiques intéressantes pour un traitement bien veillant des animaux-dinosaures

Le point fort du film demeure ses thématiques, dans la tradition des Jurassic Park/World et plus largement des films de science-fiction. Si les dinosaures sont des dangers, le plus grand danger pour l'Homme et la planète reste l'Homme dans le film. Les dinosaures sont en fait une métaphore de nos animaux, à l'image des élevages de dinosaures exploités dans des fermes similaires à ce qui se fait pour les porcs et les vaches. Le marché noir des dinosaures confirme par la suite cette thèse de l'exploitation. Claire, dans ses méthodes, rappelle par ailleurs les militant.es de chez Peta ou L214. Jamais les dinosaures ne sont vraiment menaçants dans le film, en tout cas beaucoup moins que l'humanité elle-même. On sent même une certaine tendresse dans la réalisation puisqu'ils ne sont jamais montrés en train de mourir ou en situation de souffrance, à la manière dont les films grand-publics traitent les animaux aujourd'hui. La grande menace de l'humanité dans cet épisode est le fruit de recherches fait par une boîte pharmaceutique nommée Biosyn sur des sauterelles mangeuses de récoltes. L'humanité ou plus exactement le capitalisme est la cause de la perte pour l'Homme. Cette entreprise est gérée par une sorte de Tim Cook dont on ignore d'ailleurs s'il est aveuglé par les profits ou profondément méchant. Ses recherches semblent en effet lui avoir échappées mais cela constitue un avantage tout approprié pour les plantations OGM Biosyn épargnées par les sauterelles. Le film ne nous le dit pas. Acte volontaire ou involontaire, la science échappe en tout cas une fois encore des mains des humains, ce qui est dans la continuité des messages des Jurassic de Park/World. Le message aurait tenu sans le tout dernier acte, car c'est bien une dernière manipulation génétique qui sauve l'humanité... Ce retournement nuance l'avertissement sur la manipulation génétique en ne condamnant pas ainsi toute la cherche en la matière, ce qui est intéressant.
Sur un plan plus anecdotique, Colin Trevorrow a afin compris l'esprit du monde de Spielberg en proposant des dinosaures aux plus proches des connaissances scientifiques (duvet/plumes) à la place d'une réutilisation des modèles de 1993 voire de bestioles hybrides n'ayant jamais existé. Les dinosaures sont en effet assez intéressants en eux-mêmes et l'évolution de la recherche permet de présenter de nouveaux visuels réalistes innovants, ayant par ailleurs un certain intérêt de vulgarisation scientifique.  


En définitive, Colin Trevorrow nous livre son "Avengers" de la saga Jurassic Park/Jurassic World sans grand talent visuel ni histoire passionnante mais aux thématiques plutôt intéressantes. Loin toutefois des œuvres de Spielberg. 



******

lundi 16 mai 2022

The Northman

 


Synopsis :

Amleth, fils du Roi Horvendil voit son père tué par son oncle et est obligé à l'exil. Il promet alors de revenir un jour venger son père et libérer sa mère... 


Commentaire : 

Film stylisé à outrance ?

Robert Eggers s'attaque à la fresque historique tout en souhaitant apporter une vision artistique très loin du réalisme. Sa vision est poétique, mais au sens de la poésie des sagas Vikings ; brutal et sans concession. Les combats présentés, sur un rythme lent (pour une fois au cinéma) et dans de longs plans séquences léchés sont visuellement intéressants. La photographie est l'atout principal du film. Il y a manifestement une patte graphique affirmée, teintée de la mise scène de l'horreur, genre sur lequel le réalisateur a fait ses premières armes. Ce film est un objet hybride par son visuel particulièrement stylisé (encore plus pendant les scènes d'hallucination) et sa volonté de produire un film historique sur les Vikings pour lequel de nombreux experts de la période ont été consultés. En effet, l'époque dans sa matérialité et ses superstitions semblent bien maîtrisée. Toutefois, c'est un défi particulièrement audacieux qui n'est malheureusement pas complètement satisfaisant dans son rendu final. En effet, le cadre réaliste se voit totalement anéanti par l'histoire d'une violence crue qui joue avec les clichés de cette société plus que d'en proposer une vision pertinente et nuancée. La mise en scène ultra-violente et horrifique ne rend donc pas grâce à ce peuple fantasmé. Elle renforce au contraire le fantasme jusqu'à le rendre émétique. Fort dommage! La musique de Carolan et de Gainsborough continue dans le cliché avec les tambours de guerre et les chants à voix graves, bien que l'utilisation de plusieurs instruments d'époque offrent un rendu intéressant. Le résultat technique de cette œuvre osée est un shot de virilité sans dérision et au premier degré. Une tragédie sérieuse, intéressante parfois lorsque ses origines théâtrales se signalent à l'écran. Certes, cette vision viriliste pourrait correspondre aux fantasmes des populations de l'époque Viking mais l'histoire manque de souffle et le personnage principal de nuance pour que cette proposition présente un intérêt de nos jours.

Adapter Hamlet ?

Robert Eggers offre un film intéressant dans sa volonté d'adapter la plus fameuse pièce de Shakespeare à l'époque Viking, car Shakespeare s'est probablement inspiré d'un évènement de l'époque Viking pour produire sa pièce au XVIIème siècle. Robert Eggers a, dans un sens, rendu ce fait à son époque, autrement dit a rendu à ce fait, sa primitivité originelle. Toutefois, plus que de recontextualiser cet évènement, Robert Eggers l'a restitué à son époque par le prisme fantasmé de notre époque sur le Xème siècle Viking. 

Le fatalisme antique 

Shakespeare, élève des auteurs antiques, et les Vikings croient au Destin. Le Destin ne peut être évité : c'est le fatalisme. Ainsi Amleth devra se venger. Cette nécessité guidée par les dieux est bien présente dans l'histoire. Le personnage, élevé par son père, croit dur comme fer à son destin. Le film semble, approchant le climax, prendre une voie plus pertinente en proposant une explication des raisons qui ont poussé l'oncle d'Amleth à agir. Il est alors possible, à cet embranchement du film, de dépasser le fatalisme et les valeurs d'époque. La masculinité toxique (ultra-violente à l'époque) est dénoncée, le film semble amorcer un propos critique. Toutefois, le héros n'ayant que faire de cette révélation ne semble pas appuyé cet axe du film. A la fin, il reste alors juste l'impression d'avoir vu une ode à la bestialité.


En définitive, The Northman est une proposition audacieuse de renvoyer la pièce d'Hamlet à ses origines Vikings. Visuellement intéressante, cette proposition fantasme trop son sujet pour en faire un film d'époque pertinent. 




******

mercredi 11 mai 2022

Doctor Strange in the Multivers of Madness

 

Synopsis :

Steven Strange fait des rêves étranges, qui paraissent plus vrais que nature. Mais ces rêves sont-ils simplement une simple illusion du cerveau ou une fenêtre sur d'autres univers ?


Commentaire

Sam Raimi, le maître de l'horreur

Sam Raimi retourne aux superhéros après sa prestigieuse décennie 2000. Loin de se laisser cadenasser par Marvel, il impose sa patte en imbibant Marvel de son genre favori : l'horreur. Genre par excellence pour travailler la mise en scène grâce au travail sur le hors-champs et le ressenti du spectateur, le genre horrifique apporte un style bien particulier à cet épisode de Doctor Strange. Steven Strange et Wanda Maximoff deviennent alors les muses horrifiques de Sam Raimi. Par ailleurs, chaque plan revêt une idée de mise en scène et chaque transition est travaillée. Notons en particulier une caméra dynamique avec des plans débullées, qui peut très bien passer à travers les murs ou utiliser les reflets pour continuer la séquence. Certains éléments reflètent directement le cinéma de Raimi comme la scène de corniche dans New York lors du combat contre le premier monstre (la bête aux tentacules). Les scènes de combats - d'action sont particulièrement bien filmées avec enfin des plans en pied, plus larges laissant respirer l'image. La scène la plus réussie sera évidemment le combat "aux notes de musique", parfaitement en symbiose avec la bande musicale de Danny Eflman, le compositeur favori de Sam Raimi. Si Elfman n'apporte pas de thème particulièrement reconnaissable - retenable, il excelle à mettre en place une ambiance angoissante, à mettre en valeur les scènes grâce au mickeymousing ou tout simplement à donner au film une autre envergure grâce à une musique symphonique et orchestrale classique et classieuse. Le film est réussi car il s'agit d'un film de Sam Raimi avant d'être un film de la "série" Marvel.

Le scénario, petit point faible 

Si le scénario est convenu et tient la route, l'inévitable recours au multivers crée immanquablement quelques problèmes. Par exemple, Doctor Strange s'adressant à un double maléfique prend pour acquis qu'ils ont vécu un même évènement dramatique dans leur enfance. Premièrement, la séparation des lignes de réalité n'est-elle pas trop récente (série Loki) pour que 2 Strange si différents puissent exister ? Deuxièmement, s'il existe bien une infinité d'univers parallèles, comment Strange peut-il penser qu'un double a forcément vécu la même expérience que lui ? Il manque peut-être un chef d'orchestre général chez Marvel pour établir des règles communes aux productions sur ce fameux multivers. Le scénario fait alors ce qui l'arrange. Notons à côté des problèmes du multivers, quelques éléments également là encore peu subtiles. L'utilisation des générateurs de mémoire dans un monde du multivers par Strange et America Chavez est un procédé un peu facile pour amener des flashbacks qui arrangent le scénario. Toutefois, l'ensemble reste encore acceptable pour une production de ce type. 

La thématique : l'acceptation 

L'existence du multivers est pour Doctor Strange et Scarlet Witch la possibilité d'obtenir ce qu'ils souhaitent, car ce qu'ils cherchent (son ex-femme pour Strange et ses enfants pour Wanda) existe forcément quelque part. Le dénouement ne peut ainsi avoir lieu que dans le renoncement, car le multivers est la métaphore de l'éternel désir. Wanda doit accepter l'état de son existence et Strange accepter de ne pas tout contrôler. Au début du film, Strange est bloqué dans le passé, symbolisé judicieusement par une montre cassée... quand choisira t-il alors de dépasser sa frustration et de symboliquement faire réparer sa montre ? Il doit apprendre d'abord à lâcher prise. Le film utilise à ce propos, encore, quelques éléments scénaristiques un peu convenus - faciles comme le fait que Strange doive se résoudre à placer sa confiance dans une fillette dont le succès ou l'échec déterminera le destin de l'univers... de tout le multivers! Un homme si sage peut-il faire ce pari ? Ou est est-il plutôt un homme de foi qu'un homme sage ? Toutefois, la morale est entendable voire plutôt intéressante venant d'outre atlantique. Doctor Strange doit en effet apprendre à laisser faire et à accepter le monde tel qu'il est. Le self-made man américain est enfin opposée à une proposition bouddhiste (ou nietzschéenne - chacun choisira) qui parait plus raisonnable et surtout plus propice à la paix intérieure. Doctor Strange n'est-il pas avant tout un grand sage aux inspirations orientalistes ? 

En définitive, Doctor Strange in the Multivers of Madness est un excellent film de l'écurie Marvel parce qu'il est un film transpirant la patte de Sam Raimi. 




******

samedi 23 avril 2022

Les Animaux Fantastiques : les secrets de Dumbledore

 


Synopsis : 

Grindelwald est pourchassé à travers le monde de la magie mais le grand attiseur de haine entre les moldus et le sorciers prépare son retour. De son côté, Dumbledore ne peut l'en empêcher, tenu par un pacte de sang avec son ancien amant. C'est alors que Robert Dragonneau rentre en jeu... 


Commentaire :

David Yates, toujours à la technique

L'équipe technique de la saga des Animaux Fantastiques ne change pas pour ce troisième épisode avec toujours David Yates à la tête. La réalisation est plutôt de qualité que cela soit les effets spéciaux ou les transitions, dépassant ainsi le simple objectif narratif (voir les transitions du passage du monde des sorciers au monde réel ou les scènes montrant l'utilisation des portoloins). Toutefois, la colorimétrie étant assez sombre dans certaines scènes (c'est d'ailleurs l'ambiance générale du film), certaines séquences d'action ne sont parfois pas toujours lisibles, cela étant accentué par un montage assez rapide. Les scènes bénéficiant de ralentis (que justifie la magie) sont en revanche beaucoup plus belles, d'autant plus si elles sont lumineuses. Le film est par ailleurs fortement soutenu par la musique de James Newton Howard qui reprend avec habilité les thèmes de la saga mais aussi ceux de la saga Harry Porter. Cela ne manque pas d'apporter un supplément d'âme et de nostalgie au film, qui du fait de son scénario, en a parfois bien besoin.

Le scénario sans ligne de force

Ce troisième épisode de la saga, fruit de l'écriture de J.K Rowling, étonne du fait que les enjeux n'impriment pas et que la mise en tension dramatique échoue à donner du relief à l'histoire. Ce problème réside dans le fait que ce film présente trois histoires dont aucune ne prend le pas sur l'autre, ou autrement dit, aucune n'assume de devenir le fil rouge dramatique. Il y a l'histoire de Dumbledore et Grindelwald, l'histoire de Norbert Dragonneau et l'histoire de Croyance et son ascendance. Les trois histoires s'effacent mutuellement dont certaines encore plus que d'autres comme celle de Croyance (pourtant préparée par le second épisode). Qui est finalement le personnage principal ? Dumbledore ? Quel projet l'unissait dans sa jeunesse à Grindelwald ? Le film ne le sait pas et ne désigne pas de personnage central. Le montage y fait peut être pour quelque chose mais le scénario ne fait que mettre en place des personnages à l'histoire linéaire, voire sans histoire. C'est le cas du petit groupe de Norbert dont tous semblent avoir une mission au début mais dont les trajectoires individuelles n'apportent rien au film. L'exemple le plus emblématique est de celui de Yusuf Kuma qui possède une mission qui dure presque tout le film mais dont l'utilité est nulle. Si la mission était coupée du film, elle ne changerait rien à l'histoire... comme la majorité des actions de la bande de Norbert. L'explication donnée est que cela sert à brouiller les pistes pour Grindewald mais cela est mal agencé au montage pour que l'ensemble de l'histoire soit intéressante à regarder. Autre exemple : le personnage de Santos devant qui le Qilin finit par se courber : aucune scène ne montre qu'elle a un cœur pur, si ce n'est l'interruption du sortilège du doloris sur Jacob. Cela prend 1 seconde montre en main dans le film... c'est bien mince comme preuve. Aucun personnage n'est finalement assez travaillé pour qu'une histoire puisse provoquer un attachement émotionnel. Ils sont même parfois atones, même Grindelwald qui laisse ses ennemis en vie et s'exprimer sans aucune raison logique (ou qui laisse Santos interrompt son doloris)... à part pour arranger le scénario. 

Les thématiques désamorcées [spoilers]

J.K Rowling a toujours à cœur d'ajouter et de dissimuler des thématiques politiques dans ses histoires. C'est également le cas dans cet épisode. Les sujets sont particulièrement intéressants : il s'agit de la question de la démocratie et de la liberté d'expression. A savoir si n'importe quelle idée doit pouvoir s'exprimer dans le champ démocratique, même les idées extrêmes. Censurer ces idées auraient-ils un effet contre-productif ? C'est en tout cas la question amenée par le président allemand de la confédération mondiale de la magie. Le peuple peut-il se prononcer sur les idées de Grindelwald et les rejeter ? Le président allemand semble faire le même pari que le président Hindenburg a fait pour Hitler. Cela ne serait pas illogique étant donné les parallèles que J.K Rowling aime faire avec l'Histoire. Malheureusement, J.K Rowling ne se prononce pas sur la démocratie car Grindelwald ne joue pas selon les règles. Le peuple est abusé puis découvre la supercherie. Toutefois, sans artifice, le peuple aurait-il quand même fait le bon choix ? Toute idée peut-elle être mise au débat. L'histoire ne nous le dira pas même si Dumbledore s'oppose tout de même à l'idée que les positions extrêmes puissent être soumises au vote du peuple. Après tout Hitler est bien arrivé au pouvoir par les urnes. Il reste regrettable que l'histoire désamorce cette thématique... comme finalement elle désamorce l'histoire de tous ses personnages...


En définitive, ce troisième épisode décevra certainement par son intrigue décousue et ses enjeux mal amenés. L'ambiance et les effets spéciaux pourront néanmoins consoler les amateurs de l'univers d'Harry Potter. 

lundi 7 mars 2022

The Batman

 


Synopsis :

Gotham City est gangréné par la pègre et la corruption. Batman incarne alors la vengeance dans une ville où la Justice n'est pas rendue. Toutefois, il est mis à l'épreuve par une série de meurtres impliquant un certain homme mystère...

Commentaire :

Une mise en scène classieuse de film noir

Matt Reeves, connu pour avoir brillamment terminé la saga de la Planète des Singes, s'attaque avec réussite au genre du Super-héros. Toutefois, le film s'inscrit avant tout dans le genre du film noir, avec son atmosphère très glauque, une tonalité visuelle très sombre avec un travail sur les ombres et une photographie léchée jouant sur les lumières artificielles de la ville de nuit. C'est en effet la photographie qui marque du fait du grand nombre de plans travaillés. Les plans sur Batman, particulièrement en pied sont souvent mémorables dans l'iconisation du super-héros, mais les plans sur la ville, personnage à part entière sont également marquants. La profondeur de champ dans la ville (notamment sur les plans de rue) avec des lignes qui s'étirent, sert à dépeindre Gotham City en ogre étouffant. On retrouve la ville américaine délabrée des années 80-90 qui écrase les honnêtes gens. Ce qui fait de ce Batman un bon film, même avant d'être un bon Batman est le sens donner à la mise en scène qui sert souvent à décrire la thématique de la scène. La mise en scène est ainsi loin d'être uniquement fonctionnelle, elle souligne le propos (voir le plan où Batman devient un symbole d'espoir en guidant les citoyens de Gotham). Le point faible du film peut se situer au niveau de son montage et du rythme, notamment dans la première partie du film. Toutefois, le scénario à tiroirs, point fort en revanche de ce thriller, finit par apporter un réel dynamisme. La musique est également de très bonne facture avec Michael Giacchino dans un style beaucoup moins orchestral qu'à l'habitude. Les violons stridents du film noir et du film d'horreur font beaucoup pour l'ambiance générale. Michael Giacchino arrive également à donner un thème mémorable (en 2 notes, comme the Dark Knight) à ce nouveau Batman. Il faut dire qu'il est répété abondamment. Giacchino utilise également le mickeymousing pour souligner l'action par la bande sonore. Un vrai travail a été ainsi réalisé autour de la bande musicale, qui a par ailleurs été écrite avant le tournage des scènes. En fin de film, Giacchino retrouve un style plus symphonique qu'on lui connait mieux. Le défi de la bande musicale est parfaitement relevé. 

Des thèmes traités et exploités ? [Spoilers]

Les films autour de Batman, chez DC, sont très riches en thématiques depuis plusieurs décennies. Les Batman chez Nolan proposaient une philosophie politique, le Batman Vs Superman de Snyder (la Snyder's cut) proposait une métaphysique alors que le dernier Joker de Phillips proposait une approche sociologique de Gotham. Malheureusement, le Batman de Reeves n'a pas la même puissance thématique bien que différents sujets des précédents Batman se retrouvent dans le film. L'approche social du Joker est limité du fait que la critique structuraliste des super-riches n'aillent pas complètement au bout, en épargnant ou en ménageant pour le moins Thomas Wayne, même s'il semble que le film ait failli prendre ce chemin. Par ailleurs, le questionnement autour de la légitimé de l'action de Batman reste amoindri au regard du film de Snyder du fait que le Batman de Reeves présente un jeune Batman qui lui même ne sait pas vraiment en vertu de quelle valeur il agit. Il pense agir au nom de la vengeance, ce qui est d'ailleurs l'appellation qu'il se donne lui-même. Le film traite plutôt intelligemment ce premier aspect du personnage qui finit par voir les limites de sa légitimité, lorsque des groupuscules d'extrême-droite reprennent cette appellation. L'antagoniste principal du film, leader de ces groupuscules pense d'ailleurs travailler avec Batman et le guide à travers la corruption dans la ville. Certes Batman se bat aux côtés des plus faibles mais il n'utilise pas les mêmes méthodes ni n'a le même objectif que ces individus radicaux. Lorsque Batman se rend compte qu'il peut servir de bannière à la folie, il choisit de changer de symbolique. Il choisit alors d'incarner l'espoir, ce qui est quelque peu regrettable puisqu'il s'agit d'une vieille valeur transcendante - religieuse, de plus associée à Superman. Elle n'est par ailleurs pas suivie d'effet en tant que simple croyance contrairement à la Vengeance et la Justice. Le choix de la Justice comme symbolique aurait été plus judicieux puisqu'elle aurait permis de corriger l'action de vengeance et expliquer que la mesure intrinsèque à la Justice permet d'éviter les dérives et les récupérations douteuses. C'est par ailleurs la Justice qui fait défaut à Gotham du fait de la corruption. Toutefois, ce Batman étant jeune, cette orientation sera peut être un sujet des prochains films. Si la symbolique est un peu décevante, la description presque sociologique des milieux d'extrême-droite est en revanche plutôt fouillée et pertinente notamment dans son rapport aux réseaux sociaux. Il est intéressant de noter que leurs revendications premières sont d'ailleurs entendables voire légitimes et que le capitalisme, qui plus est corrompu, offre le parfait terreau à l'émergence de tels groupes. 

En définitive, The Batman de Matt Reeves remet DC à l'honneur en proposant un film noir, sombre à souhait pour le héros de la nuit. Espérons que cette proposition de cinéma trouve un large public.  



******


dimanche 20 février 2022

Marry me

 

Synopsis :

Kat Valdez est une superstar américaine, icône de la chanson. Elle et Bastian ont prévu de faire leur demande de mariage sur scène, suivis par près de 20 millions de spectateurs. A quelques instants de la demande, une vidéo de Bastian embrassant l'assistante de Kat fuite sur les réseaux... 


Commentaire :

Mise en scène classique

Kat Coiro réalise un film classique et efficace. La mise en scène est essentiellement fonctionnelle mais plutôt soignée avec la particularité de bien filmer les scènes de concert. Ces scènes bénéficient de légers contre-plongées afin de mettre Kat Valdez en avant et de créer l'illusion que le spectateur suit un concert à la télévision. Il est un peu regrettable toutefois qu'il n'y ait pas d'innovation dans la manière de filmer un concert mais l'objectif ici était bien de faire croire à la réalité de la représentation. Néanmoins, plus que la réalisation c'est l'équipe artistique de Jennifer Lopez et encore plus Jennifer Lopez elle-même qui donnent l'illusion que l'on a faire à de vrais spectacles d'une reine de la pop. Quelques petites particularités sont les split-screens et les surimpressions montrant les écrans des smartphones et les réactions des "followers" suivant en direct la vie de Kat Valdez. Au-delà de ces éléments, le film reste très classique dans sa mise en scène. Au niveau de la musique, l'écriture et l'interprétation des chansons par Jennifer Lopez est un des éléments forts du film. La musique d'orchestre de John Debney est plutôt discrète et moins marquante à côté. 

Un feel good movie

Cette comédie dramatique, bien écrite et bien jouée est en fait très banale dans ses ressorts. En général, le genre implique que les amants qui en apparence semblent n'avoir rien en commun finissent par se questionner sur ce qui est vraiment important dans une relation amoureuse et dépassant leurs différences, finissent ensembles. C'est exactement le développement que prend le film avec la rencontre entre deux univers ; la petite classe moyenne New-Yorkaise et le monde hyperconnecté d'une popstar internationale. Charlie essaye de rappeler et de montrer à Kat ce qui est important pour être heureux dans la vie, c'est à dire pour lui une sorte de rapport stoïcien à la vie. Kat doit comprendre qu'elle n'est pas obligée de vivre pour les autres et ne pas attendre les honneurs et les récompenses pour être heureuse dans sa vie. Charlie est là pour lui rappeler la valeur des choses alors que Bastian représente la superficialité et le matérialisme consumériste. C'est ainsi que les spectateurs souhaitent que, contre toute attente, cette relation fonctionne. Un message aussi classique que la mise en scène mais cela est mené intelligemment et est agréable à suivre. 


En définitive, Marry Me est une comédie romantique menée par Jennifer Lopez tenant toutes ses promesses. Un feel-good movie. 




******

lundi 14 février 2022

Moonfall


Synopsis :

L'astronaute Harper n'est pas pris au sérieux suite à un incident intervenu lors d'une mission de sortie spatiale. Pourtant, il est certain qu'un élément exceptionnel est à l'origine de cet incident. Quelques mois plus tard, des données de la Nasa semble montrer que la Lune dévie de son orbite... 


Le commentaire :

Emmerich et le spectacle total

Spécialiste des films catastrophes, Roland Emmerich revient à son genre favori. Les plans grand-angle et plans d'ensemble sont légions, ce qui est la grande force de cette mise en scène qui s'intéresse autant à ses personnages qu'aux évènements physiques (les catastrophes). Le résultats est comme à son habitude visuellement très impressionnant même si le rendu de quelques effets spéciaux (très peu heureusement) est un peu en deçà. Par ailleurs, Emmerich est connu pour préférer les fonds verts aux décors réels ce qui démultiplie nécessairement les occasions d'avoir au moins quelques effets médiocres. L'ensemble est toutefois de très bonne facture. Le film est rythmé ce qui ne l'empêche pas de paraître long du fait d'une intrigue à tiroirs. En effet, les révélations s'enchaînent au cours du film ce qui permet à l'histoire de se prolonger alors que le montage alterné cher à Emmerich imbrique, en plus, plusieurs histoires. Si l'histoire se passant sur Terre (avec les enfants) est un peu moins prenante, il s'agit d'une partie importante du cinéma d'Emmerich, axée sur la survie et qui permet de garder une vision très terre à terre, alors que les enjeux sont planétaires voire au interstellaires pour l'intrigue Fawler/Harper (les adultes).  A la musique Harald Klauser et Thomas Wanker ont du mal à s'imposer alors que les scènes d'exposition et descriptives sont assez nombreuses. La musique fait son travail d'accompagnement sans atteindre la puissance d'autres œuvres d'Emmerich comme Le Jour d'Après (2004) même si Klauser était également à la manœuvre. 

Sans grande thématique environnementale

De nombreux thèmes sont abordés sans qu'un seul soit véritablement traité du fait de la densité de l'histoire. En cela, il s'agit plus d'un film catastrophe qu'un réel film de science-fiction bien que de nombreux thèmes y soient communs ici. Il n'y a par ailleurs pas le thème de la nature vengeresse venant punir l'hubris humain souvent présent chez Emmerich. Ce dernier met toute son énergie dans la rédaction d'une histoire catastrophe de science fiction. Autrement dit, il s'agit d'un film à scénario et non d'un film thématique. Les postulats du film vont par ailleurs très loin en empruntant quelques idées aux complotistes. Ce n'est toutefois pas la première fois (2012). Certains thèmes sont intéressants comme celui des sphères de Dyson (sujet important de la science-fiction spatiale) alors que le thème avoisinant des mégastructures (plutôt du côté des complotistes - fake news) est un peu moins pertinent. De même, l'intelligence artificielle est abordée sans qu'il y ait une vraie réflexion dessus puisque le film a d'autres priorités ; au premier chef, la survie de ses personnages. Le thème de l'apparition de la vie sur Terre (qui rejoint la théorie des anciens astronautes - les ingénieurs de la vie sur Terre) est également abordé rapidement. Cette caractéristique des sujets peu développés s'explique par le fait que toutes les grandes révélations se font dans la dernière demi-heure du film. Cela permet tout de même un bon film catastrophe. Toutefois, le thème le plus important comme souvent chez Emmerich est plus personnel ; celui de la famille, réel moteur pour les protagonistes pour se dépasser, voire se sacrifier. Le thème de la filiation-famille semble particulièrement central ici, avec l'idée qu'il faut croire en ses proches (fils, femme, mère, père etc.) et ce même au delà de la Raison. Cette dernière assertion qui peut être belle pour l'histoire est tout de même plus problématique dans l'absolu, d'autant plus si la vie de la Terre en dépend... Mais rien d'étonnant chez Emmerich qui aime raconter avant tout de belles histoires.

En définitive, Moonfall est un nouveau film catastrophe de Roland Emmerich, tout aussi visuellement impressionnant que les précédents avec en plus cette fois-ci un côté science-fiction prononcé. Pour les amateurs du genre.



******

samedi 8 janvier 2022

Kingsman

 

Synopsis : 

Alors que la Première guerre mondiale est sur le point de se déclencher, le Duc d'Oxford tempère son fils qui rêve de partir sur le front. Le Duc est en effet toujours peiné par la mort de sa femme et ne souhaite pas que son fils rentre dans un cycle de violence. Il préfère une méthode plus discrète et moins brutale : l'information...

Commentaire :

Matthew Vaughn dans son style

Matthew retourne derrière la caméra (et au scénario) pour réaliser le troisième épisode de la saga des Kingsman. Ce prequel dans sa mise en scène bénéficie des qualités formelles des précédents épisodes, c'est à dire d'un soin particulier pour produire du divertissement. Les scènes de combat sont à nouveau extrêmement léchée, le paroxysme étant la confrontation impliquant Raspoutine dans un style qui rappelle les danses russes. Le combat final à l'épée dans un style Errol Flynn, parfaitement mis en image également, a été agrémenté de quelques innovations comme des plans "subjectifs" pris depuis la garde de l'épée. Plus généralement, tous les combats bénéficient d'une chorégraphie aboutie avec un montage dynamique sans qu'il ne soit frénétique et déstructurant pour la scène. Le reste du film bénéficie de plusieurs artifices visuels, de faux plans séquences, dont certains plans de départ ou d'arrivée laissent penser à une inspiration de la BD. Les reconstitutions d'époque sont assez soignées, notamment quand les décors sont faits en dur, comme pour les tranchées dans des tons de couleurs plus vifs qu'à l'accoutumée. En revanche, les décors faits en CGI (le lieu où habite le grand méchant) sont un peu moins convaincants mais il aurait été effectivement impossible de trouver un lieu naturel s'en approchant. A la musique, Henry Jackman est cette fois-ci absent. C'est son habituel binôme Matthew Margeson qui prend la suite sans qu'il soit possible de savoir qu'il y a eu changement (ou plus précisément demi-changement) de compositeur. La réalisation laisse beaucoup de place à la musique mais cette dernière sait également s'imposer et parfois relancer un film un peu long dans sa première partie. Les thèmes cultes des précédents épisodes reviennent, d'autres tout aussi bons arrivent également comme pour la scène d'ouverture avec un thème manifestement hommage à Lawrence d'Arabie ou un nouveau thème pour marquer la relation entre le Duc et son fils.  

Le scénario "historique" 

Matthew Vaughn adore les reconstitutions d'époque comme le témoigne la plupart de ses films. Même les derniers Kingsman, se passant à notre époque, avaient des protagonistes enfermés dans un certain style daté, ce qui engendrait une transcription dans les décors. Ici le rapport à l'Histoire se fait dans un style qui reprend son X-Men (le Commencement), avec des évènements réels dont les causes profondes sont en fait différentes de celles connues. Cela fonctionnait plutôt bien pour la crise cubaine avec les X-Men, les explications pour la Première Guerre mondiale sont en revanche un peu grosses. Et si la plupart des évènements (hormis leurs causes avec l'intervention des King's Men et leur antagonistes) sont effectivement tirés de faits réels, ce film montre également de grosses lacunes. Sans que cela soit préjudiciable aux péripéties narrées, le film réussit tout de même l'exploit de parler de la Première guerre mondiale sans évoquer directement ou indirectement la France! Alors que le film essaye de s'emparer du sujet de la géopolitique internationale d'époque! A tel point que la fameuse espionne Mata Hari est récupérée pour intervenir en Angleterre (au lieu de la France). Un point de vue anglo-saxon pas si inhabituel mais cette fois-ci poussé à l'extrême. 

Des thématiques : du pacifisme à la révolution

Les Kingsman sont en général d'excellents films du fait des nombreuses thématiques abordées. Cet épisode ne fait pas exception aux autres avec toutefois plus ou moins de succès dans le traitement des différentes thématiques. Le Pacifisme, sujet de discorde entre le père et le fils est un sujet bien traité et sur lequel le film insiste beaucoup. L'impact émotionnel est particulièrement fort du fait de certains choix de scénario qui n'étaient que peu prévisibles. Faut-il s'abstenir de s'engager quitte à laisser gagner ceux avec de mauvaises ? Si le film trouve une voix alternative : le renseignement plutôt que le goût du sang, il reste tout de même fermement anti-nationaliste en affirmant qu'aucune cause ne justifie de mourir pour son pays sur le champs de bataille. Il y a des raisons de mourir mais pas pour les intérêts des politiciens. Beaucoup moins bien traitées, sont les révolutions ou les tentatives de révolutions du XXième siècle. Cela est dû à un antagoniste aux motivations plus floues que pour les épisodes précédents. On comprend sa haine des monarchies d'Europe (c'est peut-être pour ça qu'il n'est pas question de la France), et particulièrement de la monarchie anglaise. Toutefois ses manigances et son action pour déclencher la Première guerre mondiale sonnent fausses car démesurées. Il aurait été pourtant assez facile d'engendrer de l'attachement pour un personnage dénonçant les privilèges du sang. La révolution du russe ainsi que les tentatives de révolution au Royaume-Uni se trouvent être réduites à une simple manigance haineuse d'un personnage frustré. Toute la dimension collective de la Révolution disparait. En revanche, la description des origines de la noblesse par le personnage principal, le Duc d'Oxford est plutôt pertinente : d'anciens individus violents qui se sont hisser dans la hiérarchie des Hommes. 


En définitive, Matthew Vaughn réalise à nouveau un excellent King's Man riche en rebondissements et en scènes visuellement abouties. Il réussit également l'exploit de parler de la géopolitique de la Première guerre mondiale sans évoquer le rôle de la France... 




 *******