Les sorties de la semaine

mercredi 10 juin 2015

Jurassic World


Synopsis :

Plusieurs décennies après l'échec de Jurassic Park, des investisseurs ont repris le projet de John Hammond. La leçon oubliée, il est question de faire un parc plus grand, plus moderne, avec plus de dinosaures et même avec des créatures n'ayant jamais existé...


Commentaire :

Une mise en scène inégale

Le film commence bien, aussi bien au niveau de l'hommage à la saga que de la mise en scène. Très vite, on a le droit à un plan sur une patte crochue. On s'attend à la présentation des véritables héros de la saga et... non. Il s'agit d'un dinosaure mais d'un dinosaure moderne, un oiseau! La mise en scène a du sens, elle rend compte directement de la filiation des espèces. Malheureusement, c'est le seul exploit de mise en scène car le reste est simplement fonctionnel. Comme tout film narratif, cela est en fait assez logique mais le problème est qu'elle est répétitive. En voici un exemple. Le premier travelling en plongée sur le parc est intéressant pour présenter les lieux et rend très bien en 3D. Avec le thème de John Williams, c'est une superbe présentation! Les suivants, quelques minutes plus tard, sont de trop, hormis pour la forme, c'est à dire la 3D. Heureusement, un changement d'échelle finit par se produire et nous met au plus près de la foule. La mise en scène est donc correcte mais loin d'être extraordinaire. Les effets spéciaux sont néanmoins très bons et arrivent à faire oublier les animatroniques, ce qui était loin d'être gagné. Les combats, fruit de chorégraphies, d'effets spéciaux et de la mise en scène sont réussis. Dans la forme, le film est donc plutôt satisfaisant.

Une écriture moyenne

Le problème se trouve donc au niveau du fond. La progression de l'histoire est linéaire et donc très téléphonée. Le scénario n'est pas assez raffiné pour surprendre hormis quelques rares exceptions. C'est un point assez problématique car l'histoire générale est attendue, la seule question est donc de savoir comment la machine va dérailler. La réponse étant peu complexe, il reste simplement le spectacle de l'action. Les dinosaures en eux-mêmes ne sont pas particulièrement exploités (à l'exception des plus connus) et ne sont pas un spectacle en eux-mêmes. Cela est relativement dommage car ils sont l'ADN de Jurassic Park. Les personnages sont également peu attachants. Entre des enfants dont l'histoire n'est pas assez creusée et dont l'impact sur l'intrigue est faible et deux adultes à la personnalité stéréotypée, la profondeur n'y est pas. Sans parler du personnage voyant des applications militaires partout. Dans une certaine mesure, seuls le docteur Wong (bien qu'un archétype aussi) et surtout le milliardaire Masrani sont intéressants. Malheureusement, ils sont très secondaires. Pour autant, le film est paradoxalement sauvé par un élément...

Paradoxalement sauvé par l'hommage

Le réalisateur Colin Trevorrow est un grand fan de la Saga et cela se voit. Ainsi, si les fans sont désolés par la qualité de la production, ils pourront être heureux de voir que les références sont nombreuses. Pour ainsi dire, elles sont mêmes trop présentes, indice allant dans le sens que Jurassic World n'arrive pas à créer sa propre aventure. D'ailleurs, les références ne font pas toujours sens et paraissent disséminées simplement pour l'hommage. Les vélociraptors, le T-Rex, les 4x4, le docteur Wong, les lieux, les deux enfants etc, tous ces éléments sont des références au premier film de Spielberg. Ce dernier s'était également distingué par la rigueur scientifique de son film, ce qui n'est pas le cas pour cet épisode. La recherche a en effet fait d'énormes avancées depuis les années 90. L'hommage aurait donc dû se trouver dans les intentions de réalisation, c'est à dire qu'il aurait sans doute fallu faire un film à la pointe des connaissances dans le domaine de l'archéologie plutôt que de faire des hommages copiés / collés de quelques figures et designs. Cela aurait été plus subtil. Néanmoins, paradoxalement ces références, associées aux thèmes de John Williams, sauvent le film en apportant un peu du souffle et de la magie des anciens films. - A noter que quelques thèmes de Williams sont réutilisés mais c'est Michael Giacchino qui est à la composition -. Le climax est par exemple construit autour du retour d'un héros du premier film qui, même s'il est dans une situation ubuesque, arrive à conclure le film de manière satisfaisante. Néanmoins, on constate à cette occasion que Trevorrow est avant tout un fan de la saga mais pas nécessairement des dinosaures. Cela constitue effectivement un souci pour le fond. 

Des thématiques non renouvelées (spoils)

Le premier film Jurassic Park abordait la thématique du progrès et de la science confrontée à leurs exploitations commerciales. La thématique est exactement la même ici et n'est pas plus approfondie. Le message de Jurassic Park était en substance que l'homme est loin d'avoir tous les outils et la sagesse nécessaire pour maîtriser ses créations. Pour Jurassic World, la thématique est abordée de la même façon avec les mêmes résultats mais de manière moins subtile. L'époque fait que la question est plus radicale. La technologie permet en effet aujourd'hui de rationaliser beaucoup de choses et de ramener des éléments vivants à des chiffres. Cette évolution dangereuse de notre société est, à juste titre, soulignée mais peut-être un peu trop. Il est évident que le personnage de Clair a perdu tout sens de la réalité et ne pense qu'au profit et à la satisfaction des actionnaires. Chez Spielberg, son sort aurait été scellé pour la morale. Ici, elle finit sain et sauve avec juste une bonne leçon... Au vu de son attitude au début, cela n'est pas mérité. En revanche, le milliardaire Masrani qui lui refuse de mettre des chiffres derrière toute chose connaît un sort funeste. Il a été certes un peu naïf mais simplement aveuglé par son optimisme. Ce personnage était intéressant et aurait mérité un meilleur sort. La saga ayant une dimension morale, ces dénouements sont surprenants. Concernant le personnage cherchant des applications militaires chez les dinosaures génétiquement modifiés, sa fin est attendue mais cela était particulièrement évident étant donné le monolithisme du bonhomme. En outre, sa place n'est pas forcément pertinente bien que cette piste n'ait pas avant été abordée. On imagine peu des vélociraptors sur les champs de bataille. Quant à son argument consistant à dire que ces créatures feraient mieux que des robots perfectionnés, il est vraiment très difficile d'y croire. Jurassic World aurait donc dû prendre le pari d'aller sur des pistes inexplorées car ré-aborder des thèmes déjà visités de manière moins pertinente en rajoutant des pistes incongrues a rendu le fond du sujet peu intéressant.

En définitive, Jurassic World divertit. Mais la magie, la découverte et l'aventure n'y sont plus. Il y a presque une mise en abîme entre le film et le parc : il faut donner plus au spectateur... mais a t-il seulement besoin de plus ? Trevorrow paraît s'amuser avec les dinosaures comme un enfant avec des figurines. 





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