Les sorties de la semaine

vendredi 27 août 2021

Bac Nord

 


Synopsis :

La BAC Nord de Marseille réalise ses missions malgré la faiblesse des ressources allouées à la brigade et des situations de terrains parfois très tendues. Laissée à elle-même, elle utilise des moyens alors illégales pour remplir les missions qui lui sont assignées... 


Commentaire :

Réalisation : l'immersion réaliste 

Cédric Jimenez souhaite nous emmené au plus près de l'action avec une réalisation au style brute et réaliste. Si certains plans ont une vocation esthétique (paysages, plan en plongée totale, transitions travaillées), la principale ambition de la mise en scène est ici de faire ressortir la dureté et la tension de la situation. Ainsi, les plans subjectifs et les caméras épaules sont légions, l'ensemble étant par ailleurs rythmé par un montage très dynamique. La colorimétrie recherche le réalisme cru avec des couleurs très ternes malgré le climat ensoleillé de Marseille. Le rendu sur le béton et les grands ensembles est parfait  et souligne la situation précaire de ces territoires délaissés. Du fait de cette réalisation et des lieux choisis, Marseille ressort par sa face sombre puisque c'est la cité phocéenne populaire et problématique qui est exclusivement montrée. La bande musicale, composée entre autres de morceaux de variété, a pour vertu d'alléger parfois la tension et ainsi d'accompagner les temps faibles après des temps forts émotionnellement très puissants. La mise en scène ne va pas s'en rappeler le style des Misérables de Ladj Ly de par son ambition réaliste. 

Entre dénonciation et parti pris 

Inspiré de faits réels, le film ne souhaite pas prendre parti sur l'affaire ayant touché la Bac Nord de Marseille. Il vrai qu'il est impossible pour le spectateur de se prononcer sur l'affaire à partir du film puisqu'il faudrait connaître les faits exacts (le film est en partie une fiction) et les lois concernant les faits énoncés. Toutefois, le film apporte tout de même son point de vue sur les péripéties touchant les trois protagonistes de la Bac. Premièrement, le film dénonce à juste titre les moyens ridicules mis au service de la Bac face à une situation sociale explosive dans certains quartiers. Certains territoires de Marseille apparaissent être des zones de non-droit, dans lesquelles l'Etat s'est désinvesti et où la police n'est plus présente que par intermittence. Tout n'est presque qu'illégalité et se trouve être toléré de fait. La police se trouve être par ailleurs dévoyée par la politique du chiffre si bien que l'intérêt général et concret de la population ne se trouve être qu'un aspect secondaire du métier. Ainsi, la police fait face à une situation insurmontable tandis que les politiques cherchent à éviter les vagues. Cette description tant de la police que de la gestion de la police par le politique est défendable et d'ailleurs plutôt étayé par la recherche. En revanche, le parti pris sur l'affaire est plus ambigu. La Bac Nord a été accusée de trafic de stupéfiants. La film décrit l'action des policiers comme une nécessité, dans le sens où les policiers devaient, à la demande du préfet, attraper des parrains de la drogue, sans moyen. Ils ont donc fait à la manière marseillaise, c'est à dire en se débrouillant avec les moyens du bord - payer un indic avec de la drogue. Les policiers se trouvent ensuite punis par la hiérarchie. Notons au passage que cet élément fait des policiers des vrais habitants de Marseille, plus proches des habitants qu'ils ne sont proche de l'institution et du politique. Si cette version des faits met le spectateur du côté des policiers débrouillards, qui ont fait du mieux possible pour répondre aux ordres, cette version demeure la version des policiers, ces derniers ayant été consultés par Cédric Jimenez. Si le sort réservé à ces policiers est particulièrement injuste dans le film, il est impossible de savoir si les faits montrés dans le film sont conformes à la réalité. Bac Nord ne tenterait-il pas de montrer une certaine version de l'histoire, qui tout en précisant que cela relève en partie de la fiction, induit le spectateur à se forger un avis sur l'affaire réelle. 
Le dénouement réel de l'affaire nous le dira. 
 

En définitive, Bac Nord est film immersif qui emmène le spectateur au plus près de la réalité de terrain. Cédric Jiminez, sans prendre parti dans l'affaire judiciaire de la Bac Nord, vient toutefois appuyer moralement la version policière par la fiction.


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