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mardi 23 mars 2021

Snyder's cut Justice League

 


Synopsis :

Superman, "l'homme d'acier", est mort. Il reste des héros pour protéger la Terre, mais la mort du plus puissant des gardiens terrestres attise les convoitises venues d'autres univers... 


Commentaire :

La tant attendue direction de Snyder

La photographie justifie l'attente. Justice League retrouve son envergure épique avec ses nombreux plans symboliques dont bénéficient régulièrement les Superhéros. La raison de ce choix pour Snyder est assez simple : les Superhéros sont les nouveaux dieux, à l'image des anciens dieux présentés dans le flasback et comme le confirme Wonderwoman : "il faut croire". Le côté épique ne va pas sans le soin extrême apporté au cadrage, dans un film où chaque plan est lui même une peinture, tant du point de vue de la composition que de la colorimétrie. Ainsi, les ralentis trouvent parfaitement leur place dans des plans composés comme des toiles. Le format 1:33 lié historiquement à la télévision donne à l'ensemble un côté distingué, se singularisant vis à vis des formats larges du blockbuster. Ce choix entre en accord avec le rythme, parfois plutôt lent qui ne trouve plus sa place dans les grandes productions, composées exclusivement de temps forts sans respiration. La Snyder's cut est donc un objet cinématographique singulier dans laquelle l'emprunte du réalisateur se sent pleinement (si ce n'est pour les thématiques que nous aborderons en dernière partie). Toutefois, il faut reconnaître qu'un film d'une telle durée (4 h) n'aurait pas pu sortir en l'état au cinéma. Si cette version à la grande qualité de prendre son temps pour montrer ses enjeux, il n'en reste pas moins quelques longueurs qui ne s'expliquent pas par la nécessité de contre-balancer un temps fort. Il faut être plutôt fan et connaisseur du Snyder's verse ou de l'univers DC pour accepter toutes les scènes proposées. 
Toutefois, force est d'admettre que la version de Snyder possède un véritable cachet au regard de la version de Joss Whedon, qui à sa décharge devait remplir un cahier des charges bien précis de la Warner dont une durée maximum de 2h agrémenté d'humour.
A la musique, Junkie XL remplace Danny Elfman pour une orchestration plus cohérente dans la continuité de Batman Vs Superman et de Man of Steel. Toutefois, les thèmes iconiques/historiques de Batman (série animées des années 90) et de Superman (film de fin des années 70) disparaissent avec regret, avec le départ de Danny Elfman. 

Réalisation exigeante [spoilers]

S'il va de soi qu'il est nécessaire d'avoir vu les précédents films DC de Zack Snyder, la réalisation adopte également l'adage du "show don't tell". A plusieurs reprises, le film évoquera le scénario visuellement sans qu'un dialogue vienne le confirmer, ou alors ce dernier arrivera bien plus tard. Ainsi, la mise en scène par elle-même doit faire comprendre des éléments de scénario, ce qui peut être déroutant pour le spectateur habitué au genre. Il en va ainsi pour la mort de Superman (et comprendre que son cri réveille les boîtes-mères), pour la prophétie amazone montrée au départ simplement par des mosaïques dans les souterrains, ou encore de la possibilité pour Flash de remonter le temps. Ces éléments ne sont jamais mentionnés directement par le dialogue alors qu'ils sont fondamentaux pour comprendre l'intrigue. Dans le même genre, les différentes villes visitées ne voient pas leur nom apparaître à l'écran comme le ferait Marvel, des géosymboles sont montrés à l'écran ; au spectateur de les situer. Ainsi, bien que certaines scènes soient longues elles demandent une attitude active du spectateur. Sans aller jusqu'à Nolan, qui lui peut parfois se retrancher derrière une mise en scène prétentieuse qui sanctionnera la moindre inattention, Snyder s'adresse respectueusement à ses spectateurs sans mâcher le travail. 

Thématiquement moins ambitieux que Whedon

Si l'ensemble des enjeux scénaristiques est plus clair que chez Joss Whedon, la Snyder's cut est moins ambitieuse que la version Whedon dans ses thématiques. Cela peut d'ailleurs paraître étonnant pour le réalisateur de Watchmen et Batman Vs Superman (version longue) qui aborde sans crainte des thématiques philosophiques essentielles comme le déterminisme, la nature de Dieu, ou la vérité en démocratie. La faute ici aux caricatures de méchants, de Steppenwolf à Darkseid qui contrairement à un Thanos ne se réfugient pas derrière des arguments pouvant touchés le spectateur. Toutefois, le Steppenwolf de Joss Whedon n'était pas plus intéressant. En revanche, le réalisateur des Avengers avait su placer d'autres dilemmes comme l'utilisation de la technologie (ici Superman est ressuscité sans questionnement sérieux), ou le choix entre sauver des civils ou combattre Steppenwolf (la zone du combat final est ici inhabitée). Joss Whedon semblait également vouloir réaliser une transition entre Batman et Wonderman, en mettant une superhéroïne en avant et en interrogeant la place de ce superhéros vieillissant (une sorte de Ironman). Certes, la version de Snyder se distingue par sa mise en scène et ses symboliques (le Superman christique ressuscité avec les bras en T) mais sans amener de nouveaux questionnements, par rapport à ses films précédents. Le thème nietzschéen de la mort de Dieu semblait pourtant approprié ici. Un autre dilemme proposé par Znyder n'a malheureusement pas fait le chemin jusqu'à sa version finale. Il s'agissait d'une romance entre Bruce Wayne et Loïs Lane dans laquelle le retour de Superman signifiait la fin de cette liaison. Ainsi Bruce Wayne devait choisir entre l'Amour et la Raison. Il reste pour cette version l'idée assez simple que l'Union fait la force, et encore, l'Union sans Superman ne vaut rien. Dans un sens, Whedon avait mieux réussi à faire ressentir l'union de la Justice League grâce à ses scènes de dialogues re-shootées, dont les fameuses scènes humoristiques tant décriées. Dans tous les cas, que cela soit la version Snyder ou Whedon, il manquait au Supervilain une raison suffisamment sophistiquée pour agir afin de faire de Justice League un des meilleurs films du genre. La version de Snyder restera une œuvre visuelle avant d'être une œuvre intellectuelle. 


En définitive, la Snyder's cut est incontestablement supérieure à la version de 2017, de par sa réalisation extrêmement léchée et plus cohérente avec les films précédents. Il manque toutefois, et encore pour cette version, un méchant moins archétypal. 




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