Les sorties de la semaine

jeudi 13 février 2014

La Belle et la Bête



Synopsis :

Après le naufrage de ses trois navires, un vieux marchand est contraint de déménager à la campagne avec ses trois filles et trois fils. Par la suite, il est averti qu'un de ses bateaux a été retrouvé. Il se rend alors avec un de ses fils constater ce qu'il reste de ses biens. Sur le chemin du retour, le marchand se perd dans la forêt et rencontre une Bête dans un château abandonné. Le marchand ayant cueilli une rose pour sa fille Belle, la Bête lui propose un marché : "une vie contre une rose"...


Commentaire :

Un mélange d'influences réussi

Christophe Gans, grand maître pour associer harmonieusement différents genres et styles (Le Pacte des Loups), réussit une nouvelle fois à réaliser une oeuvre originale aux influences variées. De part l'ambition, son projet est certainement américain, la France ayant délaissé le merveilleux et les contes féériques depuis de bien trop nombreuses années. Néanmoins, Christophe Gans, en faisant ce "blockbuster à la française", ne cherche pas à imiter les américains mais à se référer à une grande époque du cinéma français, appelée la "qualité française". C'est à cette époque que fut réalisé La Belle et la Bête de Cocteau (1946). De ce fait, de part les costumes, certains dialogues et le style baroque du château, les références au maître sont marquées. Le choix de la colorimétrie du Technicolor des années 40 est manifestement, aussi, une référence réussie à cette époque, en plus d'être une réussite esthétique. Enfin, en tant que grand amateur du cinéma asiatique, Christophe Gans s'approprie avec grâce l'univers de Miyazaki, visible à travers les magnifiques paysages de montages verdoyantes, le dieu de la forêt, les géants et les petites créatures du château. Certains plans avec les géants, prenant la Bête dans leur main, peuvent même faire penser à la référence même de Miyazaki, Le Roi et l'Oiseau.
Christophe Gans veut montrer avec ce film que la France peut encore produire des films originaux: cela est réussi. Il s'agit d'un "film patriotique" comme le dit lui même le réalisateur, à l'image du bateau arborant un gigantesque drapeau français.


Bande musicale puissante

L'ambition d'un film se voit aussi dans sa bande musicale. Elle est très présente, pesante et appuie la mise en scène. Il s'agit d'une très bonne musique de type classique qui participe complètement à la féerie de ce conte. A certains moments, on croirait même entendre quelques notes de Joe Hisaishi, le compositeur de Miyazaki. Il ne s'agit pas probablement d'un hasard, Christophe Gans ayant surement donné pour consigne que l'hommage à l'univers de Miyazaki se dénote également dans les notes. 
A noter que la chanson de fin, interprétée par le gagnant de The Voice, est plutôt réussie, dans la tradition des grandes chansons de fin des films américains.


Une mise en scène à la Gans

Christophe Gans est un grand réalisateur. La mise en scène est prégnante, parfois virtuose lorsque la caméra se promène dans les airs, admirable lorsqu'il s'agit de faire des transitions. La mise en scène est notamment réussie pour le passage entre les différents mondes, entre le livre et l'histoire du conte et entre le passé et le présent dans les rêves de Belle. La touche de Christophe Gans se lie particulièrement dans les scènes d'actions, qui sont manifestement ses moment favoris, de part ses courts ralentis qui appuient sur les actions extraordinaires.


De bons acteurs

Il n'est pas étonnant de retrouver Vincent Cassel aux côtés de Christophe Gans. Son rôle de la Bête semble, de plus, aller de soi, l'acteur ayant un certain côté maniéré (royal) et mais également un physique plutôt animal, éloigné de l'image du prince charmant. Il incarne parfaitement le prédateur séducteur. On aurait peut-être aimé une voix constamment grave pour sa forme de Bête, comme lorsqu'il chuchote dans plusieurs scènes. Quant à Léa Seydoux, elle s'en sort particulièrement bien. Toutefois, on n'aurait peut-être aimé voir une autre jeune fille pour interpréter Belle, plus belle... Grâce au maquillage et à la comparaison avec ses soeurs, Léa Seydoux passe plutôt bien et réussi parfaitement à tenir son rôle. Et puis quels choix restent-il lorsque Pathé (dirigé par Jérôme Seydoux) produit le film  et que Jérôme Seydoux est directement producteur sur le film ? Ainsi, Josette Day (de Cocteau) n'a pas trouvé équivalent à sa beauté. Peut être qu'Emilie Dequenne du Pacte Des Loups était plus appropriée. Le reste du casting est bien trouvé.


Trop de retenue

Le film pâti malheureusement de quelques manques. De manière plus ou moins anecdotique, on regrette que Christophe Gans n'est pas plus utilisé les petites créatures du château qui avaient un réel potentiel. Elles sont très peu présentes alors qu'elles sont sensées, selon la voix-off, partager de réels moment de complicité avec Belle. De plus, les enfants auraient manifestement aimé (et pas qu'eux). Toutefois, si cet élément est plus ou moins important et peut être laissé de côté, on ne peut que regretter le trop peu de temps consacré à la psychologie des personnages et à l'évolution de leurs sentiments. Comme dans un conte, les personnages changent sans grandes explications. Néanmoins, Cocteau avait plutôt réussi à mettre la relation entre Belle et la Bête au centre de l'histoire, ce qui faisait la chair du conte (tout comme Disney). Et puis, si Christophe Gans a voulu mettre Belle au centre de l'histoire, l'histoire de la Bête reste plus intéressante. Belle est belle d'apparence et de coeur, l'ambiguité est plus intéressante chez la Bête. En définitive, le film manque un peu de poésie et les rares moments poétiques passent plus difficilement du fait que on ne puisse comprendre ou adhérer aux sentiments des personnages.

16/20



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