Les sorties de la semaine

mardi 18 décembre 2018

Une affaire de famille


Synopsis :

Un père et son fils rentrent dans un magasin. Ils se coordonnent tous les deux pour que l'enfant mettent le plus de choses dans son sac. De simples voleurs ? Sur le retour pour chez eux, les deux protagonistes croisent une petite fille maltraitée et montrent alors leur grand cœur... 


Commentaire :

Une mise en scène au service du corps familiale 

Ce film de Kore-Eda est un drame à la réalisation dynamique. Exit les plans fixes et longs et sans ambition de certains drames. Le réalisateur japonais donne un véritable rythme à son film par la mise en scène (travellings et autres mouvements, et des plans variés) cela entrant en synergie avec la légère tension constante amenée par l'intrigue. Il s'agit en effet d'une famille qui est au bord du précipice et dont le spectateur redoute qu'elle n'y tombe. Pourtant, il s'agit d'une famille unie. Tous les personnages bénéficient de gros plans ou de plans en taille, chacun avec son histoire propre symbolisant un problème de la société. Seuls le "père" et sa "femme" sont présentés par la mise en scène en duo. S'ils ne sont pas ensembles, ils sont avec un enfant. Dans un sens, ils sont le nœud de la famille. La mise en scène ne sera jamais aussi belle que lorsqu'elle réussit à réunir tous les membres de la famille dans le cadre, que cela soit pour la scène du feu d'artifice ou lors de la sortie à la plage. La réalisation nous le dit : cette famille est liée, cette famille fonctionne alors bien même qu'il n'y a pas de lien de sang. La photographie est sombre à l'image de la situation décrite mais la musique de Haruomi Hosono est douce pour décrire une famille heureuse. La situation est paradoxale : la famille fonctionne mais se trouve sur le fil du rasoir. 
En définitive, la mise scène est fonctionnelle et pleine de sens. Elle justifie du point de vue technique sa Palme d'or.

La thématique : qu'est-ce qu'une famille ?

Le propos de Kore-Eda ne change pas et rejoint celui de son très beau film déjà primé à Cannes : Tel Père, tel Fils. Qu'est-ce qu'une vraie famille ? La famille présentée est peut-être liée par la misère, le crime et l'argent, il n'en reste pas moins que ce sont des liens affectifs qui la structurent réellement. Ce sont des personnages attentionnés entre eux, autrement dit, des personnages avec un bon fond. Cela peut même se faire au détriment de la loi comme lorsqu'ils prennent une petite fille battue. Légalement il s'agit d'un enlèvement mais eux ne se préoccupent pas de la loi, ils se limitent au rapport humain. D'un point des normes sociales cette famille est tout sauf une famille, c'est d'ailleurs ce que la société et la loi vont finir par lui rappeler. La tradition dit que le lien du sang l'emporte, tout comme la loi, reflet de la pensée dominante. Pourtant les personnages essayent de se défendre : "Est-ce qu'accoucher suffit pour devenir mère ?" dit Nabuyo, la femme qui a enlevée la petite fille battue. Non, pour Kore-Eda, la famille va au-delà. Peut-être dit-il même que le lien du sang n'a rien à voir la dedans. Ce qui compte est la solidarité et l'affection entre les individus. C'est cela pour lui une vraie famille même si elle est dysfonctionnelle du point de vue de la société. Une pensée progressive, très bien amenée.


En définitive, Kore-Eda réalise encore un chef d'oeuvre sur le thème de la famille. Au-delà de la mise en scène pleine de sens, le réalisateur japonais répond contre la société japonaise (et plus généralement contre les sociétés traditionnelles) à la question : qu'est-ce qu'une véritable famille ? La réponse est sublime. 


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