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dimanche 13 novembre 2022

Black Panther : Wakanda Forever



Synopsis

T'Challa n'est plus. Le Wakanda est en deuil et sans protecteur, Killmonger ayant brûlé toutes fleurs permettant de devenir un Black Panther...

Commentaire
 
Une réalisation toujours aussi soignée de Ryan Coogler

Ce nouvel épisode mettant en scène le héros du Wakanda bénéficie d'une mise en scène soignée de Ryan Coogler. Par leurs thématiques les Black Panther recèlent une certaine gravité mais celui-ci avait en plus à traiter la disparition de l'acteur principal Chadwick Boseman. Il en résulte un film trés sérieux pour un Marvel ; exit donc les blagues récurentes et la dédramatisation régulière d'un Thor : Love an Thunder. Le film prend le temps de traiter ses sujets en ménageant des temps faibles. Cette qualité peut aussi être un défaut sur certains passages car le film a une durée certaine et certains éléments de l'intrigue évidente mettent du temps à advenir. Au delà du rythme, la caméra est virtuose dans ce monde presque exclusivement composé en numérique. Les mouvements et les angles de caméra varient constamment et ce, pas uniquement pour les scènes d'action. La photographie est également réussie, toutefois dans la mise en scène, rien n'est particulièrement original pour un film avant tout narratif. Le casting, presque exclusivement féminin fait un bon travail (mention spéciale à Angela Bassett - la Reine mère - et Danaï Gurira - Okoye -) sans toutefois faire oublier l'absence de Chadwick Boseman. La bande musicale de Ludwig Göransson de retour fait beaucoup pour ancrer l'univers du Wakanda et soutient également les temps faibles de la réalisation. Toutefois, le film ne possède pas de scène d'exposition ou contemplative permettant à la composition de se mettre aussi en valeur que dans le premier épisode.

Thématique : la Justice par la paix ou la violence : une redite du premier ? 

L'antagoniste de cet opus est Namor, chef du peuple des mers issu des civilisations précolombiennes (Maya). Pour pouvoir garder la thématique de la critique du monde occidental, Marvel a donc transformé le héros de l'Atlantide (grec) en héros d'origine d'amérindienne, il reste toutefois quelques traces de l'ancienne origine dans les chants de sirènes séduisant les marins. Il s'agit comme pour le premier opus d'un film communautaire (sans connotation négative) mettant en avant d'autres cultures. Ici, le monde du peuple de la mer issu de la civilisation maya est assez travaillé et intéressant visuellement et culturellement (langue utilisée). Il en demeure toutefois un problème pour l'intrigue : le film oppose les civilisations mais ne peut réellement décrire les ennemis du Wakanda comme des méchants (car cela manquerait de délicatesse pour les peuples d'Amérique centrale). Il en résulte que la résolution de l'intrigue n'est pas pleinement satisfaisante. En revanche, le fait d'avoir un antagoniste ambigu est intéressant car ses motivations sont compréhensibles voire partageables. Un bon méchant est un gage de qualité pour un film de super-héros. 
Le film affiche une volonté cathartique, dans la veine du premier épisode. En intrigue secondaire, il en profite pour mettre une petite claque (bien méritée) aux anciennes puissances coloniales toujours à la recherche de plus de ressources à exploiter. Toutefois, la description géopolitique actuelle est un petit peu simpliste car les politiques impérialistes en Afrique aujourd'hui (au Mali par exemple) ne sont plus simplement le fait du monde occidental. Les charniers au XXIème siècle sont plutôt le fait de puissances illibérales, bien que la politique capitaliste de l'occident soit encore critiquable. Dans le même ordre d'idée, appelé les "blancs" par le sobriquet de "colonisateurs" est oublier que d'autres peuples ont déjà eu ces mêmes aspirations (avec moins de moyens certes) et que tous les peuples caucasiens n'ont pas forcément eu des empires coloniaux. Ross (Martin Freeman) en tant qu'américain peut être le représentant d'une politique impérialiste, toutefois les Américains n'ont pas eu d'empire colonial. Pendant la guerre froide avec l'URSS, les deux superpuissances étaient en faveur de la décolonisation. Néanmoins, Marvel ne peut prétendre donner un cours de géopolitique et le film joue habilement sur la crête de la démagogie avec certaines communauté, à la manière du dernier Black Adam de DC. Fait habilement, cette catharsis n'est pas forcément un mal. 
Toutefois, la faiblesse thématique de ce film n'est pas la justesse du propos mais le fait qu'il s'agisse d'une redite des enjeux du premier Black Panther. En effet, le premier Black Panther était un réinvestissement du duel théorique entre Martin Luther King et Malcom X. Le but est la Justice mais les moyens d'action diffèrent. Ici, la même opposition voit de nouveau le jour entre le Wakanda et le Prince Namor. Toutefois, la réponse a déjà été apportée dans l'opus précédent. Le film rate en plus cette fois-ci le symbole car Shuri porte les couleurs de Killmonger, même après avoir renoncé à la vengeance. Elle aurait dû reprendre les couleurs de son frère après la résolution de son dilemme, ainsi le message aurait été clair et l'héritage de T'Challa intact. 


En définitive, Black Panther Wakanda Forever est un bon épisode marvélien, sans toutefois se hisser au même niveau que le premier épisode. Si l'inclusion de la culture maya est incontestablement un succès, le dilemme thématique entre la violence et la non-violence dans un idéal de Justice est une redite du premier opus. 


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